Origines et histoire de notre sport
Publié : 22 mars
Les arcs que vous pouvez voir sur une ligne de tir sont essentiellement de 3 types : recurves (classique ou barebow), poulies et longbow. Les différences entre ces arcs sont tellement flagrantes qu’il n’est pas toujours évident de leur trouver une filiation commune. Pourtant, si on cherche à établir des liens, on constate que chacune des catégories précitées constitue une des branches d’un arbre généalogique complexe dont les racines plongent dans la nuit des temps. Je vous propose dans cet article et les suivants de redécouvrir l’histoire de l’arc et les origines de notre sport.
Comprendre cet arbre généalogique touffu nécessitera d’aborder des aspects techniques et des conceptions parfois très éloignées de celles des archers actuels. Avant d’aborder l’histoire de l’arc, faisons le point sur le matériel actuel et le passé proche de notre sport. Nos arcs modernes font largement appel aux alliages métalliques pour les poignées, aux fibres de verre ou de carbone pour les branches, et aux fibres synthétiques pour les cordes. Il n’en fut pas toujours ainsi !
Si vous observez de vieilles photos de tournoi d’archerie ou des arcs classiques des années 1950 (on en retrouve parfois en brocante, dans les greniers des familles d’archers ou dans les musées), vous constaterez que la majorité de ces arcs étaient exclusivement en bois ! Depuis le 19e siècle, certains d’entre eux étaient fabriqués en assemblant par collage plusieurs lames de bois d’essences différentes.
Pour àªtre complet, signalons aussi l’existence (et la commercialisés avec un certain succès) d’arcs en acier ou en alliage d’aluminium dans les années 30. Après-guerre ils seront concurrencés et supplantés par l’arrivée sur le marché des arcs renforcés de fibre de verre.
L’immédiat après-guerre fut le début d’un à¢ge d’or pour notre sport. Le développement de l’ingénierie et des matériaux synthétiques (fibres de verre, puis de carbone) a été une véritable révolution technologique dans de nombreux domaines, dont l’archerie. Concepteurs et fabricants rivalisèrent d’ingéniosité pour améliorer les arcs en utilisant de nouveaux matériaux, mais en travaillant aussi beaucoup sur la forme et le fonctionnement de l’arc. Tous ces développements ont contribué à la naissance des arcs recurve (barebow et classique) et à modifier de fond en comble le matériel que nous utilisons. Dans la foulée de ces développements, quelques acharnés épris de mécanique et de physique appliquée vont créer en 1967 les premiers arcs à poulies.
Màªme les arcs que nous désignons actuellement dans nos clubs et règlements sous l’appellation « arcs traditionnels  » ou « longbow  » n’ont plus qu’une lointaine filiation avec leurs ancàªtres. C’est sans doute à cause de leur silhouette en arc de cercle et de l’absence d’accessoire (qui les différencient immédiatement des autres arcs) qu’ils ont gardé ce nom.
Ils n’ont pourtant plus grand-chose en commun avec les longbows anglais (qui sont des arcs simples ou selfbow  »). Alors que les véritables longbows sont fabriqués au dépend d’une seule pièce de bois, les arcs « traditionnels modernes  » sont constitués d’une à¢me en bois prise en « sandwich  » entre deux couches de fibres de verre ou de carbone.
Ces laminations de fibres modernes permettent un allègement important de l’arc, une réduction en longueur, largeur et épaisseur des branches sans sacrifier en puissance, ni en sécurité. Ces arcs « traditionnels modernes  » possèdent un rendement mécanique, un confort et une souplesse d’utilisation bien supérieurs à ce que peut offrir arc simple en bois. Autres différences importantes, Le longbow des origines est ambidextre, ne possède pas de
poignée pistolet (plus ou moins ouvragée), de fenàªtre d’arc, ni de repose flèche. Ces adaptations sont apparues après la seconde guerre mondiale. Ces adaptations étant omniprésentes sur les arcs actuels, je m’amuse souvent de la surprise de certains archers devant mon arc simple dépourvu de repose flèche …
Une conclusion assez paradoxale s’impose, il y a plus de différences entre votre arc du 21e siècle et celui de votre grand père de l’immédiat après-guerre, qu’entre celui qu’il utilisait à cette époque et un arc de la préhistoire …
Penchons-nous maintenant sur l’origine de l’arc. Son à¢ge réel est incertain et le sujet suscite beaucoup de débats entre archéologues (nous en reparlerons). Considérons seulement les données certaines et lorsqu’il faudra bien parler d’hypothèses j’utiliserai le conditionnel.
Les plus anciennes preuves d’existence de l’arc sont européennes. à‡a ne signifie pas que l’arc a forcément été inventé chez nous, mais plutà´t que l’histoire européenne est mieux connue que celle des autres continents. De futures découvertes nous réservent sans doute beaucoup de surprises, car, à l’exception de l’Australie, l’arc a été utilisé sur tous les continents depuis très longtemps.
Les preuves certaines les plus anciennes et incontestées de l’utilisation de l’arc (environ 10 000 avt J-C) ont été mises au jour dans la tourbière de Stellmoor (région de Hambourg, Allemagne). A cette époque, de grandes foràªts couvraient la plus grande partie de l’Europe avec un climat très proche du nà´tre. Ces fragments d’arcs et de flèches proviennent d’un campement de chasseurs de rennes installé au bord d’un ancien lac glaciaire. Ces trouvailles ont malheureusement été détruites pendant la Seconde Guerre mondiale. Les flèches en pin retrouvées sur le site étaient munies d’une longue pré-hampe de 15-20 cm équipées de pointes en silex. Les plus anciens arcs connus et formellement identifiés viennent d’Holmegaard (Dk). Ce site a livré plusieurs arcs (ou fragments d’arcs) datés de 6500 avt J-C. (époque mésolithique). Ils sont construits en d’une seule pièce de bois d’orme. De la taille approximative d’un homme ils présentent des branches relativement plates, larges avec une poignée étranglée. Celle-ci permet une prise en main aisée et limite le paradoxe de la flèche (qui serait très important si la poignée était aussi large que les branches. La face externe bombée (dos de l’arc) correspond au dernier cerne de croissance de la branche. Le dos de l’arc est taillé dans un màªme cerne de croissance, d’une extrémité à l’autre de l’arc. La face interne (ventre de l’arc) est plate mais sa largeur diminue régulièrement de la poignée vers les poupées. A cause de sa forme, ce type d’arc est appelé « flatbow  » ou arc plat. Les reconstitutions de ces arcs montrent qu’il s’agit d’un modèle efficace, durable et performant d’une puissance comprise entre 45 et 75 livres (selon la qualité du bois). Tout ceci montre que ces arcs ne sont pas des prototypes mais des objets aboutis dont la fabrication est maîtrisée. La date de naissance réelle de l’arc est donc antérieure à celle de ces arcs danois.
A suivre …